Une humiliation de plus

Takumi arriva dans les dortoirs en courant, les bras chargé de la boîte à nourriture. Il s'arrêté à la porte, puis ne vit d'abord pas Heichi. Il scruta la salle d'un oeil bienveillant, puis découvrit du regard, une masse enfouie sous les draps du lit de Heichi. Il devait être là. Takumi osait espere qu'il ne pleurait pas. Ce coup, c'est sûr ; s'il pleurait, Takumi aurait lui aussi pleuré.
Il s'approcha du lit de Heichi, déposa la boîte à nourriture par terre, puis s'assit lui aussi par terre, la tête posée sur le matelas du lit.
Heichi, c'est moi, Takumi...

Takumi passa ses mains sur le matelas, et y prit appui. Il déposa la boîte à nourriture sur ses maigres mains, puis l'ouvrit, devant les yeux de Heichi.
J'ai demandé un repas aux dames de cantines, puis une boîte, pour les emporter. Ca devrait être encore chaud.
Il contempla Heichi, il avait les larmes aux yeux, encore. Takumi se retint de pleurer, et n'osa rien dire de l'incident du refectoire. Il se contenta de donner la part de nourriture (généreuse) à Heichi, et de prendre la sienne, toujours assis par terre.

Heichi prit la nourriture que Takumi lui avait tendu. Il mangea silencieusement et rapidement comme s'il n'avait pas mangé depuis des siècles.
Il vit Takumi assit par terre et lui fit signe de s'installer à ses côtés.

Merci beaucoup Takumi...

Il versait de nouveau des larmes par cette gentillesse mais était toujours dans le doute, il prefera avoir le coeur libéré par un poids qui lui pesait depuis peu.

Tu sais... Il m'arrive encore de penser que toi aussi tu n'es pas sincere avec moi, que tu vas me faire un coup plus humiliant qu'à la cantine...

Heichi se sentait mal et son coeur battait encore plus, il avait peur de la réaction de Takumi et également de la réponse qui pouvait s'averer négative.

Takumi mangea à son rythme. Il aimait prendre le temps de déguster chaque aliments, surtout que les bentô que les cantinièrent préparaient (car oui, c'étaient elles qui les préparaient), c'était un véritable délice ! Il mangea peu d'aliment (mais se régala), et regarda Heichi dans les yeux, d'un regard persant.
Je te jure par Bouddha que je ne suis pas comme eux.
Quiconque connaissait Takumi savait qu'il ne mentait pas. A l'exception des moines, Takumi était l'un des meilleurs bouddhistes de tout le japon ; il vouait un véritable culte à son Dieu, et jurer par lui ne se révelait être fait qu'en cas d'extreme vérité.
Il continua à manger.

Takumi eut fini, assez vite par rapport à d'habitude. Il toussa légèrement, les yeux fermé, puis réfléchit. Heichi n'avait plus même la force de lire, disait-il ? En y repensant, il ouvrit les yeux, et regarda intensément son ami, les yeux globulaires. Il déposa leurs assiettes par terre, avec la boîte à nourriture, puis sur le lit de Heichi, s'approcha de son ami (bien sûr, il s'était assis, sur le lit, avant cela).
Ne te sens pas humilié, Heichi.
Takumi déposa ses mains à côté de celles de son ami, sur le matelas, puis se pencha vers lui, d'une manière intense. Les épaules de Takumi touchèrent les épaules de Heichi, quand il l'embrassa tendrement.

Ne te sens pas humilié, Heichi.

Heichi ne comprenait pas cette phrase lorsque son ami se rapprocha de lui, de plus en plus jusqu'à en poser ses lèvres sur les siennes. Il n'en revenait pas, il avait les yeux grands ouverts, les joues tellement rouges et brulantes que l'on aurait pu faire réchauffer le bentô dessus. Son coeur s'était remit à battre mais cette fois ci par la surprise et par quelque chose qu'il n'arrivait pas à définir.

Jamais il n'avait embrassé personne auparavent, ce baiser volé, il ne s'y attendait pas mais il ne le repoussa pas, il le trouva plutot agréable et continua un peu plus.
Quelqu'un l'aimait, c'était certes un garçon mais qu'il aimait aussi amicalement, mais depuis peu il n'en était plus sûr.

Il ferma les yeux et une larme coula sur son visage. Pour la premiere fois de sa vie, il se sentait aimé. Takumi était son ange gardien et il veillait très bien sur lui.

Sentant la larme de Heichi arriver sur sa joue, Takumi l'essuya de sa main, tout en caressant le visage de son ami. Le baiser terminé, Takumi resta toujours assez proche de Heichi, et lui carressa les cheveux. En vérité, non. Il ne les caressa pas ; il était si maniaque, qu'il ne supportait pas les cheveux en bataille de Heichi (bien que cela lui donnait un air très attirant). Aussi, en les caressant, les recoiffa-t-il. Takumi soupira, puis s'excusa alors. C'était peut-être déplacé de l'ebrasser comme cela, mais Takumi en avait envie, et de plus, cela semblait avoir appaisé son ami. Il en fut satisfait, et avait envie de le serrer contre lui. Mais n'en fit rien. Il ne fallait tout de même pas qu'Heichi pense que Takumi profitait de lui alors qu'il était au plus bas, car cela aurait été la fausseté.
Pardonne moi, Heichi. Cela était peut-être désagréable, pour toi...

Pardonne moi, Heichi. Cela était peut-être désagréable, pour toi...

Heichi aurait voulu lui dire que non, ce baiser était un mauvaise idée, aussi désagréable soit-il et que cela était déplacé de la part de Takumi d'avoir fait une chose pareil mais il ne le fit pas car cela aurait été un mensonge.
Toujours aussi rouge, il n'osa point regarder son ami dans les yeux.

Je te pardonne...Pourquoi as-tu fait cela ? - Géné d'avoir posé cette question il changea de sujet afin d'éviter à Takumi d'y répondre au cas où - merci pour le repas...

A la question de Heichi ''Pourquoi as-tu fais cela" ; Takumi préféra ne pas y répondre. Il se contenta de serrer Heichi dans ses bras (quand Takumi à envie de quelque chose, il se reiient rarement de le faire, quelle que soit la chose).
De rien pour le repas, Heichi.
Il se retira des ses bras, puis retourna dans son lit. Là, il pensait qu'il était à l'abri de tout honte possible ; il tenait ses photographies prises dans le parc de l'école :
J'ai fais cela parce que je t'aime.
Il dit ça si naturellement et si peu gêné qu'on aurait pû croire qu'il mentait, mais il ajouta :
Je te le jure par Bouddha ! Et il sourit à son ami.
Oui, rapellons-le encore une fois, Takumi avait un humour très déplacé.

De rien pour le repas, Takumi l'enlaça et Heichi, ne se senti plus gêné, il commençait à s'habituer aux gestes affectueux de son ami, il pensait que c'était naturel pour lui d'exprimer ses sentiments ainsi. Heichi l'enlaça de même brièvement. Sa timidité maladive l'empechait d'exprimer certaines choses, d'avoir une conversation normale avec quelqu'un.
Takumi se dirigea ensuite vers son lit et avait prit ses photographies posées sur la table de chevet. Heichi l'observait en se tournant les pousses. Il n'avait jamais osé lui demandé ce qu'elles représentaient et d'où venait sa passion pour la photographie car pour lui, toutes les passions ont une histoire, comme celle de la lecture pour Heichi.

Takumi brisa le silence.
Heichi. J'ai fais cela parce que je t'aime. Je te le jure par Bouddha !

Heichi le croyait maintenant, s'il s'était moqué de lui, il y avait longtemps qu'il lui aurait dit. Il se rapprocha un peu de Takumi et lui posa la question qui lui brûlait les lèvres.

Comment t'es venue cette passion pour la photographie ? demanda t-il timidement.

Heichi ne voulait pas trop blaser son ami car il lui avait déjà posé la question indirectement. Son ami lui avait seulement répondu que ce n'était qu'un simple passe temps mais Heichi voyait bien que son ami attachait beaucoup trop d'importance à ses photos pour que ce ne soit que futile.

Voici donc le moment venu pour tout lui raconter. Le moment fatidique, où Takumi devait avouer une grande partie de son passé tragique à un ami. Il n'avait jamais parlé de cela à personne, et l'affaire du meurtre de sa famille avait été si bien dissimulée que ni les journaux n'en parlèrent, ni Janghwa-Academy n'en fut au courant.
Quand j'étais plus jeune, lors de mes neuf ans, mon père a tué ma soeur et ma mère, pendant que j'étais à l'école. Puis il se suicida. Et c'est ce qu'il méritait.
Il souffla, déposa ses photographies là où elles étaient auparavant, puis repris :
De son vivant, ma mère était photographe professionnelle. On n'entendais parler d'elle que dans le milieu, mais elle s'en fichait ; elle ne faisait cela que pour sa passion. Un an avant qu'elle me quitte, en même temps qu'elle m'ait offert ce pendentif (il montrait sa chaîne), elle m'avait offert un appareil photo, avec lequel je me sentis plus proche encore de ma mère. Après sa mort, je l'ai gardé, et c'est pour cela que je photographie encore, pour me rapprocher d'elle. Comme elle, je photographierais jusqu'à ma mort.
Il ouvra le tiroir de sa table de chevet, et se pencha vers. Il en sortit un élégant appareil photographique. Un "Fujifirumu Kabushiki Kaisha" noir laqué, qui paraissait plutôt ancien. L'objectif était gros, et les boutons argentés aussi.
Le voici. Elle me l'avait acheté spécialement pour moi, parce que je m'apelle Fuji, puis nous avions l'habitude d'aller voir le Fuji-san, l'hiver. Elle avait trouvé cela amusant.
Il sourit en repensant à sa mère, puis se tut. Il semblait avoir trouvé le calme, allongé sur son lit, l'appareil photographique entre les mains, les yeux fermé. Il se redressa, puis, replaçant l'appareil, il dit :
Je vais rendre la boîte de nourriture. Tu n'as qu'à te reposer, Heichi.
D'habitude, il aurait sourit en disant cela, mais il n'en fit pas, il partit, emportant les deux plateau, du visage le plus impassible qu'il fut.

Heichi écoutait la triste histoire de Takumi, il regretta de lui avoir posé la question et il en était attristé. Il n'avait pas demandé autant de détails mais comme à son habitude, Takumi en donnait même un peu trop. Il baissa la tête il était heureux que Takumi ne lui ai pas retrourné la question sur l'histoire de sa passion. Personne ne connaissait cette histoire notamment l'étrange secret qu'il avait découvert et qui avait bouleversé tous ses sentiments.

Il regarda le tirroir de la table de chevet dans lequel Takumi avait rangé l'appareil photo qu'il lui avait brièvement montré.

Takumi se leva.
Je vais rendre la boîte de nourriture. Tu n'as qu'à te reposer, Heichi.

Takumi parti et Heichi s'installa dans les couvertures et sorti son livre. Il l'avait bientot fini et voulait en commencer un nouveau.

Deux heures plus tard, il l'avait terminé et s'empressa d'aller à la bibliothèque.